Voici la retranscription d'un faux marabout flash réalisé en 1998 par votre serviteur. Il existe à ce jour encore un exemplaire couleur et un exemplaire noir et blanc de la chose.

Je suis dans une école d’art…
… et je réussis !

Non, faire de l’art n’est pas difficile. M. Flash, après avoir mûrement réfléchi, s’est inscrit dans une école d’art. Il vous livre ici tous ses secrets pour réussir au mieux dans ce genre d’école. Du choix d’option en première année au jury final, de la peinture au cinéma, M. Flash vous dévoile tout.

I AVANT DE COMMENCER

Comment choisir ses options ?

Il existe certaines règles qui vous permettront de vous y retrouver dans la jungle des intitulés de cours artistiques. Ne vous fiez pas au seul intitulé. Essayez, autant que possible, de vous rendre à la présentation du cours. Le cas échéant, au premier cours. Le mieux étant évidemment de parler de tout ceci avec d’anciens étudiants des années supérieures. Choisissez un cours non seulement parce qu’il vous plaît, mais aussi parce que le professeur qui donne ce cours est sympathique et pas trop envahissant. Ne donnez aucun crédit à ces cours présentés par un autre professeur que celui qui les donnera. Renseignez-vous alors par d’autres moyens.

Les études artistiques comportant bien plus de pratique que de théorie, accordez – cela va sans dire – beaucoup plus d’importance au choix des cours pratiques.

Attention !

J’ai bien dit attention ! Ne concluez pas trop vite qu’il suffit de choisir uniquement des cours faciles (ou qui en ont l’air) pour réussir une année. Il vaut mieux avoir un ou deux cours difficiles (ou qui le semblent) pour remonter sa "cote personnelle".

Variez les plaisirs !

Combien de fois n’a-t-on vu de ces élèves qui se dirigent vers une branche bien trop précise et qui se font descendre par manque de variété dans le travail fourni ! Ne faites pas comme eux, choisissez une ligne directrice, prenez la plupart des cours dans cette voie, sauf un ou deux, les "étrangers". Ils vous rendront de précieux services quant à la diversification du travail (véridique !)

Les choix étant faits, surtout ne vous précipitez pas ! Il sera encore temps de remettre les documents administratifs le jour où on vous les réclamera vraiment.

Cette règle est valable dans bien des cas concernant l’administration de votre école : remise de documents, mais aussi remise de certains travaux…

Le premier travail

Il est important pour vous, mais pas tellement pour votre année. Faites simple, et si possible, visez le 11 ou 12 sur 20, voire moins, pour être sûr de faire mieux par la suite. Le plus important est de faire croire que vous évoluez, même si vous n’en êtes pas convaincu. Vous procéderez de même pour chaque nouveau professeur, même dans les années supérieures…

Deux cas se présentent à vous : soit vous venez d’une école artistique et donc vous avez certaines notions, soit vous n’y connaissez rien. Dans les deux cas, ne poussez pas au début, il sera toujours temps de se rattraper au deuxième travail. Je ne dis pas ici qu’il faut cacher ses talents. Sûrement pas. Mais au départ, un petit travail simple devrait suffire. Vous n’aurez d’ailleurs pas toujours le choix, tout dépend de vos capacités.

Vous aurez ainsi constaté que le plus important est de montrer une évolution. Simulée ou non, cette progression est indispensable.

L’évolution des travaux

N’amenez rien au cours qui suit la présentation du travail, ceci pour engendrer un retard dans le travail. Rien ne sert d’amener vos travaux trop tôt, car dans ce cas vous devrez tout recommencer deux semaines avant les cotations. Dites-vous qu’un travail n’est terminé que quand il est présenté. Avant cela la plupart des professeurs trouveront quelque chose à dire sur tel ou tel détail : pas de précipitation surtout !

Bien entendu, ne faites pas comme M.M. qui n’amenait ses travaux qu’aux présentations. Ses professeurs pensaient -à juste titre- qu’il ne travaillait que la veille et lui donnèrent une cote très basse en fin d’année.

Dès la troisième semaine, amenez profusion d’images découpées dans n’importe quelle revue. Amenez quelques idées, mais présentez-les comme encore floues, même si elles sont très claires pour vous. Ne faites pas trop de travaux préparatoires !

Enfin, une semaine avant la cotation, amenez un travail plus ou moins terminé. Notez bien les remarques du professeur car il ne vous en fera plus après. Finalisez le travail (à la maison : on est plus tranquille) et présentez-le, ainsi que des fausses notes préparatoires, objet du chapitre suivant.

Les préparations

Retenez bien ceci : "Rien ne sert d’amener des préparations tant qu’un travail n’est pas terminé."

Ce petit dicton un peu contradictoire (les préparations devraient être faites avant le travail auquel elles préparent) est pourtant vrai. En effet, la plupart des préparations posent le problème de l’orientation du travail. Si vous commencez des préparations et que le travail final ne correspond pas, le professeur ne retiendra que ces préparations et rejettera le travail final. (Psychologiquement, le résultat ne correspondra pas à l’attente. A la limite, c’est comme si vous rejetiez son avis à propos des préparations.) Vous pourrez parfois transgresser cette règle en amenant des préparations radicalement différentes du travail final. Mais là encore, mieux vaut faire les préparatifs après la finalisation.

Ainsi, vous pourrez aisément montrer une évolution dans le travail pour en arriver à l’objectif final : votre réalisation. Ceci est d’autant plus vrai que ce qui importe le plus dans l’évaluation d’un travail "relève du processus créatif".

La présentation, le jury

Nous touchons ici un point extrêmement délicat qui aura déjà fait couler beaucoup d’encre. Il serait presque utile d’y consacrer un Flash.

En effet, comparées aux dizaines d’heures passées à la réalisation proprement dite, les quelques minutes accordées à la présentation sont primordiales. Et même plus : un travail dont la réalisation n’a pas demandé plus d’une heure pourra être sauvé par une présentation convaincante, sympathique, voire intelligente pour les plus doués d’entre nous… Il en est de même pour les travaux à l’idée directrice floue, bancale, voire ceux qui sont mal réalisés.

Mais abordons d’abord un point crucial pour certains cours donnés par plusieurs professeurs à la fois. Là, dès le début, vous constaterez un problème de taille : les professeurs ont tous un avis différent. Si ils s’accordent généralement pour dire qu’un travail est mauvais, ils auront par contre plus de mal à se mettre d’accord sur ce qui est bon. Il existe néanmoins une méthode très simple pour remédier à ce problème : choisissez un professeur qui à l’air d’avoir du poids dans les cotations finales, et suivez son avis. Ne vous essayez pas à devenir ami avec un professeur qui vous est totalement antipathique : soyons réaliste, choisissez quelqu’un qui vous semble convenir, et ne forcez pas la dose.

Ce conseil tout simple devrait vous permettre de résoudre les questions les plus insolubles. Évidemment, il ne répond pas à une question bien plus fondamentale : pourquoi les avis divergent-ils ?

La présentation, l’accrochage

Parlons un peu de l’accrochage. Mettez votre travail en valeur, mais pas trop, surtout si vous n’êtes pas sûr de sa "justesse". Attention aux gros scotchs bleu, oranges,… qui vous servent à accrocher vos travaux. Usez-en avec parcimonie, même si "ça fait artiste". Ils feront, pour vos professeurs, systématiquement partie du travail. Ils n’ont pas tort, et vous demanderont d’ailleurs le sens de ce scotch, de cette grosse vis, qui prennent au moins un quart du travail. A défaut d’utiliser un accrochage plus discret, ayez une explication à portée de main.

Et plus généralement, ayez une explication pour tout.

Inutile de vous rappeler d’arriver bien à temps, une heure à deux heure(s) avant votre jury (!) car certains autres étudiants n’arrivant pas, vous serez amené à passer plus tôt. Le fait de permettre aux professeurs d’avoir toujours un travail à regarder les place dans de meilleures dispositions.

Ne parlez pas trop. Enoncez éventuellement le titre, le thème du travail, mais pas plus. De toute façon, si vous venez régulièrement au cours et que vous avez suivi les conseils ci-dessus, vous aurez au moins un professeur qui connaîtra votre travail. Voyant votre embarras, il expliquera aux autres ce que vous vouliez dire. Bien entendu, si votre travail est en béton mieux vaut donner un minimum d’explications. Mais n’expliquez jamais tout, laissez un peu de mystère. En un mot, cernez votre travail…

Les sujets de travaux, des exemples d’idées

Pour réussir un travail, il vous faudra: un bon sujet, une bonne technique, et une bonne présentation.

Un bon sujet : alors là, généralement, il vous sera fourni par les professeurs. Pas de soucis, donc. Si vous êtes à court d’idées, pourquoi ne pas copier un artiste qui a traité du même thème que vous ? Mais attention : ne choisissez pas un Roy Lichtenstein ou un Andy Warhol ou … Ils vous verraient venir avec vos cases de BD ou vos bouteilles de coca cola ! Prenez plutôt un inconnu, par exemple un artiste tchèque ou hongrois… Nos bonnes vielles bibliothèques regorgent de ces inconnus au travail souvent intéressant. Pour plus de sûreté, et pour vous assurer que vos professeurs ne le connaissent pas, demandez-leur carrément : "Connaissez-vous Mr X?" Dans la négative, copiez sans crainte, ils n’y verront que du feu. Evitez d’abuser de ce stratagème, vous êtes quand même là pour apprendre…

Une bonne technique : ici, vous aurez toute liberté dans l’exécution du travail. Ne mettez pas trop l’accent sur le soin. Trouvez une technique originale et pas trop éculée par vos camarades. Ne copiez pas bêtement le travail d’un autre étudiant, ça ne passerait (quand même) pas inaperçu.

Quatrième de couverture :

je suis dans

une école

d’ art

…et je réussis !

Le présent Flash a été rédigé par Philippe Jadin

La partie rédactionnelle de ce Flash

est absolument exempte de toute publicité

et libre de toute attache.

Postface :

MARABOUT

FLASH+

du premier travail au jury de fin d’année…

(c) 1998 tous droits de reproduction réservés

Les mots Marabout Flash, l’emblème, le format et la présentation des volumes sont déposés.

à suivre : De merveilleux exemples pour réussir votre année sans crainte.

Soyez d’ailleurs sans crainte, il y aura une suite à ce marabout… qui est loin d’être terminé et qui est sans doute plein de fautes.

A paraître également dans la collection Marabout Flash :

"Je m’habille comme un(e) artiste."

Notes :

Cet ouvrage de grande qualité (?) a été conçu à l’intention des étudiants de première année entrant dans une école d’art. Nous déclinons toute responsabilité en cas de non-réussite dans ce domaine…

Note justificative : (4 février 1999) Vous aurez constaté que ce livre s’adresse particulièrement aux étudiants de l’Erg. Et encore plus précisément à ceux qui essayent de se débrouiller dans l’atelier dit ‘interdisciplinaire’. Ce petit texte ayant été imaginé avant la fameuse réunion du mardi 2 février (qui fera date), il me semblait intéressant de vous le faire lire maintenant, amis lecteurs. Je ne critique d’ailleurs pas ici le concept d’interdisciplinarité, mais bien son application approximative dans certains ateliers. C’est de là que m’est venue l’idée d’écrire une pseudo-méthode qui permettrait de réussir dans un atelier de ce type (s'il est mal organisé, parce que sinon, ça ne marche pas du tout) de la même façon que les marabout flash permettaient d’apprendre le russe en deux semaines. En fait, ça ne marche jamais, quoique sur certains points, ce qui est dit ici n’est qu’à moitié faux… Enfin, on aura quand même bien ri.